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  • Photo du rédacteurMarion Massot

Culture Design, il est temps de casser des chaises S2E16





A écouter tous les vendredi sur :

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Retranscription en texte :


"Bonjour à toutes et à tous ! Bienvenue sur le podcast Culture Design, il est temps de casser des chaises !


Pour faire suite à l'épisode 15, qui parlait de l'innovation, nous allons nous concentrer sur une étude de cas : celle de l'entreprise Kodak face au dilemme de l'innovateur !


Eastman Dry Plate Company a été fondée par Georges Eastman en 1881, avant de prendre le nom de Kodak en 1888. Eastman fait office d’exception tant il répond au mythe de l’inventeur solitaire enfermé dans son laboratoire. Parti de rien, il est à l’origine d’un véritable cataclysme dans l’univers de la photo, révolutionnant le marché grâce à son génie.


Tout d’abord, il commence par vendre des plaques photographiques avant d’inventer en 1885, le film souple. Mais c’est en 1888, grâce à cette invention que le premier appareil-photo, avec une simplicité d’emploi inégalé va permettre le développement de la photo argentique pour le grand public. A partir de 1898, le Folding Pocket (appareil de poche pliant) devient la norme puis en 1900, apparaît le Brownie. Cet objet tellement simple et bon marché fait que la photo est désormais accessible à quiconque et devient la première innovation qui révolutionne la photographie.


En 1976, Kodak possède pratiquement tout le monopole du marché de la photographie, installe des usines en Grande-Bretagne, en Australie et se démultiplie en filiales en France. En 1907, Kodak emploie 5 000 salariés, puis 20 000 20 ans après.


Kodak se lance ensuite dans la pellicule cinéma, ce qui ne plaît guère à Charles Pathé. Mais, après des années en duel, leurs sociétés fusionnent en 1927 en France : c’est la naissance de l'entreprise Kodak-Pathé. En 1935, né le premier film, le Kodachrome qui rencontre un véritable succès sur le marché amateur.


C'est en 1975 que Kodak commencera à s'intéresser au marché du numérique, c'est-à-dire relativement tôt. Il inventera le premier appareil-photo numérique mais ne l’offrira pas au marché, par peur de tuer son commerce dominant : le film argentique. En 1986, Kodak crée le premier capteur numérique à mégapixel mais c'est seulement en 1990 que son appareil-photo numérique, le DCS 100 sera mis en vente et à un prix très élevé. 4 ans après, elle collaborera avec Apple, pour lancer un produit plus grand public mais il faudra attendre 2005 pour voir le « premier appareil-photo au monde équipé de Wi-Fi et capable d’envoyer les photos par e-mail » : les appareils EasyShare. Mais le virage du numérique sera pris bien trop tardivement, et Kodak ne retrouvera jamais son monopole.


Mais quelles étaient donc les prémisses de sa chute ?


L’entreprise connaît des difficultés dès 1980. Fujifilm, son concurrent japonais se développe aux USA et gagne de plus en plus de parts de marché à cette même période .Il s'ensuit alors une guerre des prix, ce qui érode sérieusement les marges de Kodak. L'entreprise prend conscience à cette occasion de sa structure de coûts très élevée et de l’inefficacité de son outil industriel que sa situation de monopole avait longtemps masquée.


L’identité du film restant très forte, la vente d’appareils-photos est considérée comme secondaire chez Kodak, d’autant plus qu’elle leur est beaucoup moins rentables. Mais l’année 1990 sonne le glas : Kodak se voit obligé de commencer à licencier et la première purge débute dans les usines de fabrication. Le réveil sera douloureux et l’entreprise ne retrouvera plus jamais les marges qu’elle qualifiait elle-même d’indécentes.


Pourquoi ce rejet du numérique ?


Une entreprise se définit au premier abord par son identité. Plus l’établissement sera ancien, plus son identité sera profondément ancrée, dans sa culture, chez ses employés et au sein du réseau de valeur. Dès lors, la rupture sera appréhendée comme une menace ou une opportunité, selon la façon dont elle est perçue. Cette perception dépend des éléments constitutifs de l’identité d’une organisation. En effet, c’est dans l’identité que se trouve l’impact décisionnaire de ses réactions face à son environnement. Même si l’entreprise en question a analysé minutieusement la situation, sa réponse sera inévitablement conditionnée pour être en rapport avec son identité et sa culture, quitte à utiliser le bourrage en répondant par une offre spécifique. C’est pourquoi, la photographie sans film vu comme un sacrilège d’où le premier appareil-photo numérique gardé secret.


De surcroît, Kodak, avec ses solides oeillères n’a pas manqué seulement le virage du numérique : son identité lui a empêché d’avoir une qualité de visionnaire. L’appareil-photo numérique n’est pas la seule innovation d’avenir à laquelle l’entreprise a dit non mais elle a surtout renvoyés des personnes de talents. En 1945, Chester Carlson crée un système de photocopieuse révolutionnaire, dotée d’un processus sans consommable mais pour cette raison évidente, l’entreprise refuse d’en explorer les possibles profits. Mais, « à quelque chose , malheur est bon » : Carlson fonde la société Xerox, en 1948, qui sera à l’origine des premiers photocopieurs. Deux ans après, n’ayant pas appris de son erreur, Kodak réitère. Elle éconduit l’ingénieur Edwin H. Land, venu lui présenter le procédé de photographie instantanée, connu aujourd’hui mondialement sous le nom de Polaroid. Kodak mettra vingt-six ans à se lancer dans la photo instantanée, assortie à des années de procès avec Polaroid, pour se solder avec une amende de presque un milliard de dollars en 1991.


Kodak est parfaitement au courant que l’argentique sera inéluctablement remplacé par le numérique. Mais, son marché est basé sur la vente des films, sur les lesquels il a toujours la mainmise et c’est l’absence dudit film qui lui pose problème. Le réseau de grandes et moyennes surfaces, ainsi que les buralistes, assurent la vente au détail du film.. L’entreprise gagne alors l’argent en vendant les appareils-photo très cher mais leur marge est quasi nulle dû à l’amortissement des frais de Recherche & Développement. Les appareils numériques sont réservés alors aux experts et ne se vendent via seulement des distributeurs spécialisés. On remarque alors que le premier réseau est parfaitement maîtrisé par Kodak mais sur le second… Tout est à développer mais aussi, à trouver non seulement une légitimité : les avantages concurrentiels de l’argentique deviennent inutiles dans le monde numérique : le monde n’avait plus besoin d’eux.


Aujourd’hui, Fujifilm, le principal concurrent de Kodak est toujours présent sur le marché et se porte plutôt bien. Fujifilm a compris très tôt que l’argentique était condamnée. Le monde de la photo n’avait plus besoin de Fujifilm car ils n’avaient plus besoin de chimiste ; or c’était son coeur de métier. Abandonner un temps la photo lui a permet de se concentrer sur des applications où ses compétences de chimistes seraient mises à profit.En résumé, Kodak a essayé de forcer d’adapter l’innovation à son identité, cette dernière étant majoritairement exprimée par son domaine d’activités (la photo) au lieu de prendre en considérations ses compétences techniques comme Fujifilm. Force est de constater, que malgré le fait que Kodak aura reconnu le déclin proche de l’argentique, elle forcera la rupture pour qu’elle corresponde à son identité en créant l’appareil-photo Advantix, machine numérique utilisant un film.


Le problème de Kodak ne fut pas le numérique mais bien sa prise de position pour défendre l’argentique. Quand l’entreprise a mis au point le premier appareil-photo numérique, sa réaction fût de l’ordre de « certes on a travaillé dessus, mais on le sortira quand on en aura besoin ».


Il est très difficile de savoir ce que veulent vraiment les consommateurs et comment ils choisissent plutôt tel produit ou tel service. C’est une question complexe et dépend de stratégie, de politique, de fluctuations de mode etc. En contrepoids des avantages qu’offrent la création de startup, ils ont porté le poids du passé, de la culture de l’entreprise et se sont retrouvés coincés dans un modèle, presque, fossilisé.


Merci de m’avoir écouté ! On se retrouve la semaine prochaine pour un nouvel épisode !


Vous retrouverez toutes les sources concernant le podcast sur mon site internet massotmarion.wixsite.com/websitedans la rubrique blog puis Podcast.


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Sources



Bibliographie :

- SILBERZAHN Philippe, Relevez le défi de l’innovation de rupture, Pearson, Paris, 2015, 181 pages


Sitographie :

- https://lexpansion.lexpress.fr/entreprises/comment-kodak-s-est-tire-une-balle-dans-le-pied_1375031.html


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